Le 28 septembre 2012, une révision urgente de la loi fédérale a habilité le Conseil fédéral à régler par voie d’ordonnance l’aménagement de la procédure d’asile dans le but d’évaluer de nouvelles procédures (ordonnance sur les phases de test) et à déroger à la loi sur l'asile et à la loi sur les étrangers dans ce but. Les procédures d’asile accélérées sont testées depuis janvier 2014 au centre fédéral «Juch» à Zurich.

Une expertise demandée par les JDS à Madame Martina Caroni, experte confirmée dans les questions de migrations et professeure à l’Université de Lucerne, met maintenant en doute la constitutionnalité de divers aspects de la procédure de test, en particulier sous l’angle de la garantie d’une procédure équitable. La représentation juridique déjà mise en place pourrait ne pas compenser suffisamment, dans le système prévu, la restriction des droits constitutionnels de procédure que ce système comporte. L’expertise contredit ainsi les résultats de l’évaluation externe qui tiraient un bilan intermédiaire positif.

Pas de législation spéciale

La critique dont fait preuve l’expertise trouve son écho particulier dans le contexte de la décision, lors de la session d’automne 2015, de transférer l’ordonnance sur les phases de test dans la loi sur l’asile. Cette décision revient à introduire dans la loi de nouveaux durcissements précisément sur les points les plus sensibles. Ainsi, la phase principale de la procédure comprenant l’audition sur les motifs d’asile est réduite à seulement 8 jours (art. 37 al. 2 LAsi rév.) et le délai de recours à 7 jours (art. 108 al. 1 LAsi rév.). Même si elles ne portent que sur quelques jours, ces réductions risquent d’entraîner des difficultés insurmontables dans l’accès au droit alors qu’elles n’ont pratiquement aucune incidence sur une accélération de la procédure, dans la mesure où, en moyenne, la durée de la procédure est globalement réduite de 259 jours.

La révision de la loi sur l’asile normalise les centres fédéraux qui isolent les requérant-e-s d’asile et les soumettent à une législation spéciale. Non seulement, les JDS considèrent cette évolution comme fortement problématique du point de vue juridique, mais ils et elles y voient aussi un danger de nature sociopolitique.

Nécessité d’une critique offensive

Les JDS ont été surpris d’apprendre que la révision de la loi sur l’asile avait été soutenue presque à l’unanimité par les parlementaires de la gauche et par celles et ceux défendant des valeurs libérales et sociales. Le fait que seule la droite populiste ait émis une critique («avocats gratuits») face à la réforme du droit d’asile pourrait être un signe d’impuissance politique et de désarroi juridique. Les JDS considèrent qu’il est peu productif de tolérer sans critiques la forte restriction du droit d’accès au droit et à une procédure obéissant aux formes de la justice.
Il ne saurait être question que les forces progressistes en Suisse se laissent influencer par le bourrage de crâne des courants de la droite conservatrice et des nationalistes. Cela étouffe dans l’œuf un discours courageux et authentique en société. Les JDS demandent à tou-te-s les juristes, avocat-e-s ou associations professionnelles d’avocat-e-s, et à la doctrine du droit, de ne plus faire preuve de retenue mais d’avoir le courage de s’opposer à cette évolution qui, en fin de compte, remet en cause le droit dans son entier. Les JDS s’opposent au nouveau démantèlement d’une loi sur l’asile efficace et équitable et refusent la nouvelle loi.

L’expertise et un résumé de ses principaux points ont été publiés sur le site des JDS.

Mélanie Aebli, JDS

plaidoyer 1/2016